Dévelopement du tourisme en Languedoc-Roussillon : la mission racine

350 000 touristes ont fréquenté le littoral languedocien en 1962, onze ans plus tard, ils étaient 1 400 000, jusqu’à franchir la barre des 8 millions en 1993. Ce miracle touristique porte un nom : Racine, du nom de ce haut fonctionnaire qui prit la direction de la Mission interministérielle d’aménagement touristique du littoral du Languedoc-Roussillon. Cette mission a été créée en 1963 par le Général De Gaulle en vue de créer des infrastructures touristiques dans les départements de la région, Gard, Hérault, Aude et Pyrénées-Orientales.

Ainsi, sous la houlette de Pierre Racine, directement rattaché au premier ministre, la Mission Racine a été à l’origine de la création de grands pôles touristiques et de stations balnéaires telles que la Grande-Motte, Gruissan, le Cap d’Agde et son village naturiste, Port-Leucate, Port-Camargue, Port-Barcarès ou encore Saint-Cyprien. Pour chacune, outre les appartements et résidences secondaires, il était convenu que soient insérés 18% de « lits sociaux », sous la forme de camping ou de villages de vacances.

Les travaux débutèrent par la Grande-Motte en 1965, jusqu’à concerner 180 kilomètres de littoral. En parallèle, la Mission Racine fit l’acquisition de dizaines de milliers d’hectares de sites naturels, alors mis sous protection, espaces verts urbains, réserves naturelles, sites classés, etc. Dans les ports, 9000 nouveaux emplacements virent le jour.

Ce développement de l’offre touristique, conjuguée à la protection des espaces naturels, nourrissait une autre ambition. Au début des années 60, l’Espagne venait en effet d’aménager la Costa Brava, attirant les touristes du nord de l’Europe (Allemagne, Belgique, Pays-Bas, etc.) en quête de soleil et de mer. L’idée française consistait donc à retenir ces touristes sur notre territoire plutôt que de regarder passer leurs véhicules et caravanes, direction la péninsule ibérique.

Le Général De Gaulle lançait ainsi une véritable « opération captation » de ces millions de vacanciers à travers une opération d’aménagement d’une ampleur jamais réalisée. Le résultat s’affiche encore aujourd’hui puisque la Grande-Motte accueille chaque année 2 millions de vacanciers et que le Cap-d’Agde reste la première destination touristique du littoral français. Port-Camargue abrite pour sa part le plus grand port de plaisance d’Europe.

Un autre objectif de la Mission Racine était de répondre à la crise viticole. Dès 1955 en effet, la création de la Compagnie du Bas-Rhône Languedoc par l’État avait eu pour vocation de diversifier l’agriculture du Languedoc-Roussillon et de reconvertir une partie du vignoble. Cela s’est concrètement traduit par la construction du canal du Bas-Rhône Languedoc, autrement appelé canal Philippe Lamour, du nom de son concepteur. Et c’est justement sur l’approvisionnement en eau permis par ce canal que s’est appuyé quelques années plus tard la Mission Racine, non seulement pour les nouvelles stations balnéaires du littoral, mais aussi pour la diversification de l’agriculture vers l’horticulture et le maraîchage.

Il faut dire qu’à cette période, la consommation de vins dits ordinaires avait lourdement chuté en France et que le Languedoc-Roussillon n’avait pas encore mis en place ses appellations d’origine contrôlée ou de vins de pays pour assurer la promotion de la qualité de ses nectars. En vingt ans, la moitié du vignoble de la région disparut.

Quant à la Mission Racine, elle fut dissoute en 1983, après vingt années consacrées au développement du littoral.